Au cœur d’un conflit, les blessures peuvent être si grandes que nous perdons la volonté de régler le problème avec l’autre. Nous n’avons plus confiance, car nous éprouvons de forts sentiments de trahison et d’humiliation. Un retour en arrière nous semble impossible. Si on nous proposait de secouer une baguette magique nous permettant d’améliorer la relation, nous refuserions probablement de le faire. Détester peut devenir plus sécurisant car cela nous protège du risque d’être à nouveau blessé. Pourquoi refusons-nous cette chance de rétablir l’harmonie avec un ou une collègue? Il existe plusieurs raisons de ne pas résoudre nos conflits au travail. Parmi les plus fréquemment rapportées, on note :
- Le désir de riposter
Ressentir le désir de répliquer à un(e) collègue qui nous a blessé(e) ou qui nous a fait perdre la face est tout à fait normal. Ce désir peut toutefois entraver toute motivation à réparer la relation. La riposte est une attitude qui cristallise le rapport de force et empêche toute tentative de résolution.
- L’envie d’avoir toujours raison
Chacun ou chacune croit posséder la vérité et oublie facilement que l’autre a également son vécu et ses perceptions du conflit. Cette attitude biaise complètement notre vision de la réalité. En se fermant au vécu de l’autre, nous nous armons pour mieux la combattre.
- La rivalité, le pouvoir et le contrôle
Au cœur du conflit, les protagonistes s’engagent dans une lutte de pouvoir. Le désir de gagner entretient cette lutte, puisque nul ne souhaite perdre ou sortir défait du conflit.
- L’égocentrisme
L’égocentrisme se traduit par la satisfaction de nos propres intérêts. Lorsque l’ego est blessé, nous réagissons fortement à la critique, nous privant du coup d’une introspection qui pourrait être bénéfique pour la relation.
- L’étiquetage
Affubler des étiquettes à un collègue – incompétent, inférieur, « troublemaker », nous donne l’impression d’être parfait. Cette pratique courante nous déresponsabilise face à la situation qui ne peut que s’envenimer.
- La honte et l’estime de soi
On peut reconnaître l’erreur commise en son for intérieur, mais l’admettre devant notre adversaire est plus difficile. Nous érigeons donc un mur et taisons notre sensibilité et notre empathie face à l’autre.
- La victimisation
Lorsque je me glisse dans la peau d’une victime, l’autre devient le ou la « méchant(e) ». Cette position de « martyr » nous évite de faire une introspection et de prendre conscience de notre part de responsabilité dans le conflit.
- Le ressentiment et la rancune
Le ressentiment est un état affectif durable associé au souvenir d’une frustration ou d’une injustice, généralement cristallisé sur la personne que l’on tient pour responsable. Cette rancune participe au maintien des tensions et empêche toute résolution du conflit.
- Les intérêts cachés
Le dernier point, mais non le moindre, consiste à perpétuer le conflit dans le but de préserver des intérêts cachés. Par exemple, entretenir un conflit avec mon ou ma gestionnaire me permet de justifier mon manque de rendement. Le conflit sert alors d’écran au problème réel vécu.
Au fond, l’hostilité que l’on éprouve envers une personne sert à masquer notre propre souffrance. Si l’hostilité nous protège, en contrepartie, elle nous empêche de changer notre vision de nous-même et des autres, créant un obstacle à notre développement personnel. Réfléchissons… « Quel est notre plus grand désir? Gagner la bataille ou retrouver une paix d’esprit au travail? ».
Il peut être difficile de résoudre un conflit, mais lorsque les protagonistes parviennent à s’écouter activement, à trouver leurs intérêts communs et à se donner de nouveaux modes de communication et de fonctionnement, ils sortent grandis de cette expérience sur les plans personnel et professionnel. Qu’on se le dise, s’engager dans la résolution d’un conflit, c’est faire preuve d’une grande maturité et d’une plus grande flexibilité d’esprit!
Marie-Josée Drouin, CRHA et Ginette Soucy, CRHA